N35 — Rencontre avec les Ramnamis

Une dévotion gravée dans la peau

Il y a quelques années, le hasard a placé sous mes yeux la photographie saisissante d’une femme âgée, à la silhouette fluette enveloppée d’une étole blanche aux imprimés noirs. Mon regard fut captivé par les tatouages qui ornaient son visage, ses bras, ses jambes et je restai fascinée devant ce portrait, touchée non seulement par ces marques corporelles, mais également par la profonde dévotion qui semblait émaner de toute sa personne, comme un témoignage silencieux de sa foi.

Mes recherches m’apprirent qu’elle appartenait aux Ramnami Samaj, une communauté religieuse hindoue vouée au dieu Ram. Nés dans l’une des castes les plus basses, ces fidèles s’étaient jadis vu refuser l’entrée des temples. Face à cette exclusion, ils trouvèrent une réponse d’une beauté singulière : transformer leurs propres corps en sanctuaires vivants, tatouant leur peau du nom de leur divinité bien-aimée. Ce geste n’était ni une protestation ni un acte de revanche contre les castes supérieures, mais simplement leur façon d’embrasser leur spiritualité malgré les barrières dressées devant eux. Ainsi, Ram habitait non seulement leurs cœurs et leurs esprits, mais aussi leurs corps, les inscriptions corporelles leur rappelant constamment sa présence. Leurs corps devenus temples, ils pouvaient communier avec lui à tout moment et en tout lieu, libérés des contraintes du système des castes. Bien qu’extrême, n’est-ce pas une façon incroyable d’honorer ses croyances ? À cet instant, une certitude s’imposa à moi : je devais rencontrer ces personnes qui avaient eu le courage de transformer leur apparence physique pour affirmer leur dévotion. (…)

Texte & Photos : Anne Petry


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